14 Mai 2018

fond flouté

De l’action en comblement de passif en matière de remboursement d’un compte courant d’associé

Définition du compte courant d’associé :

Le compte courant d’associé est une créance que les associés ou dirigeants détiennent sur une société, qui est remboursable et qui peut être rémunérée par la perception d’intérêts.

Sauf stipulations contraires dans les statuts, dans un pacte d’associés, ou dans une convention, le compte courant est remboursable à tout moment sur demande de l’associé et la société ne peut invoquer des difficultés financières ou un manque de trésorerie pour s’opposer à la demande de remboursement ou tenter de la limiter.

Définition de la faute de gestion :

Il n’existe pas définition légale de ce que constitue une faute de gestion et l’appréciation de ce qui constitue ou non une faute relèvera du cas par cas.

Le Code de commerce évoque toutefois les infractions aux dispositions législatives ou réglementaires applicables, la violation des statuts, ou encore les fautes commises dans la gestion.

Définition de l’action en comblement de passif :

Il ressort de l’article L.651-2 du Code de commerce que le dirigeant qui commet une faute de gestion contribuant à l’insuffisance d’actif d’une entreprise engage sa responsabilité et peut être condamné à supporter en tout ou partie cette insuffisance d’actif.

Cet article dispose que :

« Lorsque la liquidation judiciaire d’une personne morale fait apparaître une insuffisance d’actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d’actif, décider que le montant de cette insuffisance d’actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d’entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables. Toutefois, en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité au titre de l’insuffisance d’actif ne peut être engagée ».

Les conditions de remboursement du compte courant d’associé :

Si le compte courant d’associé peut être remboursé à tout moment à défaut de stipulations contraires, il existe toutefois des cas dans lesquels le dirigeant peut être condamné pour faute de gestion à raison de ce remboursement.

Le dirigeant, associé et titulaire de la créance de compte courant, peut notamment profiter de cette position stratégique pour favoriser ses intérêts et obtenir le remboursement de son compte courant au détriment d’autres créanciers, alors que la situation financière de l’entreprise ne permet pas de désintéresser l’ensemble des créanciers.

C’est ce que la Cour de cassation considérait dans une décision de sa Chambre commerciale en date du 24 mai 2018.

Dans cette espèce, un dirigeant dont l’entreprise supportait une condamnation judiciaire, remboursait deux comptes courants quelques jours après un arrêt rendu par la Cour de cassation, ce qui a eu pour conséquence de conduire l’entreprise à une situation de cessation des paiements et à l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire.

Le mandataire liquidateur assignait le dirigeant en responsabilité pour insuffisance d’actif, ce qui aboutissait à la condamnation de ce dernier, condamnation confirmée par la Cour de cassation pour le motif suivant :

« Mais attendu qu’après avoir exactement énoncé que, si les associés ont droit au remboursement à tout moment de leur compte dit courant, c’est à la condition que ce remboursement ne constitue pas un paiement préférentiel au détriment des créanciers de l’entreprise, l’arrêt relève que les remboursements des comptes courants de M. X... et de la société Staven, effectués les 10 et 15 décembre 2010, soit quelques jours après que l’arrêt de la Cour de cassation eut donné à M.et Mme A... la possibilité d’être remboursés de la somme de 166 269,08 euros qu’ils avaient versée à la société Activplast en application de l’arrêt de la cour d’appel du 15 juillet 2009, partiellement cassé, ont été opérés tandis que M. X... savait inéluctable la déclaration de cessation des paiements du 9 janvier suivant puisque toute activité de la société Activplast avait disparu et tandis qu’il connaissait le risque de devoir une somme aux époux A... auxquels les opposait une instance judiciaire ; que l’arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que les remboursements des comptes courants d’associés constituaient des fautes de gestion en ce que, privant la société Activplast de toute trésorerie du fait de l’absence d’actif disponible permettant d’exécuter la condamnation ».
 
Nasser MERABET
Avocat
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