01 Jui 2020

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Champ d'application et dérogations à l'application du statut du bail commercial

En application de l’article L.145-1 du Code de commerce deux conditions sont requises pour bénéficier de l’application du statut protecteur du bail commercial :
 
D’une part :
 
Il convient d’exploiter un fonds de commerce ou un fonds assimilé qui appartient soit à un commerçant ou à un industriel immatriculé au registre du commerce et des sociétés, soit à un chef d'une entreprise immatriculée au répertoire des métiers, accomplissant ou non des actes de commerce.
 
D’autre part :
 
Il convient de signer un contrat de bail qui porte sur des immeubles ou locaux dans lesquels un fonds de commerce ou un fonds assimilé est exploité.
 
Le cas échéant, le statut pourra également s’appliquer :
 
Aux baux de locaux ou d'immeubles accessoires à l'exploitation d'un fonds de commerce quand leur privation est de nature à compromettre l'exploitation du fonds et qu'ils appartiennent au propriétaire du local ou de l'immeuble ;
 
Aux baux des terrains nus sur lesquels ont été édifiées - soit avant, soit après le bail - des constructions à usage commercial, industriel ou artisanal, à condition que ces constructions aient été élevées ou exploitées avec le consentement exprès du propriétaire.
 
Par extension, l’article L.145-2 du Code de commerce rend le statut applicable à des personnes qui n’exploitent pas un fonds de commerce ou un fonds assimilé, dans le cadre de certains baux :
 
  • Baux des locaux ou immeubles abritant des établissements d'enseignement ;
 
  • Baux consentis aux communes pour des immeubles ou des locaux affectés, soit au moment de la location, soit ultérieurement et avec le consentement exprès ou tacite du propriétaire, à des services exploités en régie ;
 
  • Baux d'immeubles ou de locaux principaux ou accessoires, nécessaires à la poursuite de l'activité des entreprises publiques et établissements publics à caractère industriel ou commercial
 
  • Baux d'immeubles abritant soit des sociétés coopératives ayant la forme commerciale ou un objet commercial, soit des sociétés coopératives de crédit, soit des caisses d'épargne et de prévoyance ;
 
  • Baux des locaux consentis à des artistes admis à cotiser à la caisse de sécurité sociale de la maison des artistes et reconnus auteurs d'œuvres graphiques et plastiques, tels que définis par l'article 98 A de l'annexe III du code général des impôts.
 
Par dérogation, le statut n’est en revanche pas applicable aux cas suivants:
 

La convention d’occupation précaire :

L’article L.145-5-1 du code de commerce indique que n'est pas soumise au statut du bail commercial, la convention d'occupation précaire qui se caractérise, quelle que soit sa durée, par le fait que l'occupation des lieux n'est autorisée qu'à raison de circonstances particulières indépendantes de la seule volonté des parties.

Cet article a été créé par la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, qui a codifié la jurisprudence antérieure.

La convention d’occupation précaire n’est pas soumise à des conditions de délais.

Comme pour le bail :

  • La convention reconnaît à son bénéficiaire un droit d’occupation des locaux,
  • Pendant une certaine durée,
  • Et contrepartie du paiement d’une redevance.

Mais à la différence du bail :

  • Le locataire ne dispose pas d’un droit à la stabilité,
  • Le propriétaire  du local peut exiger à tout moment son départ.

Compte tenu de ces particularités, et notamment de l’absence de limite de durée, les parties ne sont pas totalement libres de conclure une convention d'occupation précaire : elles doivent en effet justifier de circonstances particulières indépendantes de leur seule volonté.

A défaut de respecter ce critère, la convention devra être requalifiée en contrat de bail commercial.

Les baux dérogatoires d’une durée inférieure ou égale à 3 ans :

L’article L.145-5 du Code de commerce dispose que les parties peuvent, lors de l'entrée dans les lieux du preneur, déroger à l’application du statut du bail commercial à la condition que la durée totale du bail ou des baux successifs ne soit pas supérieure à trois ans.

Contrairement à la convention d’occupation précaire, les parties n’ont pas ici à justifier de circonstances particulières, et doivent seulement respecter le critère de durée.

A l'expiration de la durée de 3 ans, les parties ne peuvent plus conclure un nouveau bail dérogeant aux dispositions du statut du bail commercial pour exploiter le même fonds dans les mêmes locaux.

Il s’agit ici d’une nouveauté de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, qui a modifié la position de la jurisprudence antérieure.

Si, à l'expiration de la durée de 3 ans le preneur reste et est laissé en possession, il s'opère automatiquement un nouveau bail qui, lui, sera un bail commercial soumis au statut.

La location saisonnière :

Elle est définit par l’article 1-1 de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce, comme la location d'un immeuble conclue pour une durée maximale et non renouvelable de quatre-vingt-dix jours consécutifs.

Le statut du bail commercial ne lui est pas applicable.

Le crédit-bail immobilier :

L’article L.313-7 2° du Code monétaire et financier indique que les contrats de crédit-bail immobilier sont des opérations par lesquelles une entreprise donne en location :

  • Des biens immobiliers à usage professionnel, achetés par elle ou construits pour son compte,
 
  • Lorsque ces opérations, quelle que soit leur qualification, permettent aux locataires de devenir propriétaires de tout ou partie des biens loués, au plus tard à l'expiration du bail,
 
  • Soit par cession en exécution d'une promesse unilatérale de vente, soit par acquisition directe ou indirecte des droits de propriété du terrain sur lequel ont été édifiés le ou les immeubles loués, soit par transfert de plein droit de la propriété des constructions édifiées sur le terrain appartenant audit locataire.

La jurisprudence s’est prononcée en faveur de l’exclusion du statut dans les rapports entre le crédit bailleur et le crédit-preneur (voir par exemple, Cour de cassation 3ème Chambre civile, arrêt du 7 mai 1997, n° de pourvoi 95-15504).

A la différence du crédit-preneur, le locataire commerçant du crédit bailleur peut lui se prévaloir des dispositions applicables au statut du bail commercial (En ce sens : Cour de cassation 3ème Chambre civile, arrêt du 10 décembre 2002, n° de pourvoi 01-15062).

Le contrat constitutif d’un magasin collectif de commerçants indépendants :

L.125-1 du Code de commerce en donne la définition suivante : personnes physiques ou morales réunies dans une même enceinte, sous une même dénomination, pour exploiter, selon des règles communes, leur fonds de commerce ou leur entreprise immatriculée au répertoire des métiers sans en aliéner la propriété.

Dans cette configuration, les membres du magasin collectif se réunissent sous forme de groupement d'intérêt économique, d’une société anonyme à capital variable ou d’une société coopérative de commerçants détaillants.

C’est la personne morale qui a la propriété et/ou la jouissance des bâtiments et aires annexes du magasin collectif.

Les locaux sont alors mis à la disposition des membres du groupement.

Lorsque la personne morale est locataire des immeubles du magasin collectif, le statut du bail commercial n’est pas applicable dans la mesure où elle n’est pas elle-même propriétaire et exploitante d’un fonds de commerce.

Il en va de même pour les commerçants dans la mesure où ils ne sont pas des locataires mais des associés de la personne morale.

La concession d’occupation du domaine public :

L’article L.145-2 II du Code de commerce exclut du champ d’application du statut du bail commercial les autorisations d'occupation précaire accordées par l'administration sur un immeuble acquis par elle à la suite d'une déclaration d'utilité publique.

La domiciliation commerciale :

En application de l’article L.123-10 du Code de commerce, les personnes physiques demandant leur immatriculation au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers doivent déclarer l'adresse de leur entreprise et en justifier la jouissance.

Elles peuvent notamment domicilier leur entreprise dans des locaux occupés en commun par plusieurs entreprises.

Les personnes physiques peuvent également déclarer l'adresse de leur local d'habitation et y exercer une activité, dès lors qu'aucune disposition législative ou stipulation contractuelle ne s'y oppose.

Lorsqu'elles ne disposent pas d'un établissement, les personnes physiques peuvent, à titre exclusif d'adresse de l'entreprise, déclarer celle de leur local d'habitation.

Cette déclaration n'entraîne ni changement d'affectation des locaux, ni application du statut des baux commerciaux.

Des dispositions quasi similaires existent pour les personnes morales à l'article L.123-11-1 du Code de commerce, lequel exclut, lui aussi, l'application du statut du bail commercial.

Autres contrats :

Les concessions immobilières (en application de l’article 57 de la loi n° 67-1253 du 30 décembre 1967 d'orientation foncière) et les baux emphytéotiques (en application de L.145-3 du Code de commerce) sont également exclus de l’application du statut du bail commercial.

 
 
Nasser Merabet
Avocat
contact@selarlccbs.fr